Le Kalimanthrope

Groupe de recherche pluridisciplinaire sur Kalimantan (Bornéo, Indonésie)

Gua Tengkorak vu du ciel et de l’intérieur, où ont été menées les premières fouilles en 2003 par des équipes franco-indonésiennes. Elles vont confirmer un habitat humain dans les grottes au pied des falaises, remontant à 12 000 ans BP, c’est-à-dire très antérieur à l’arrivée des premières migrations austronésiennes.

La figurine zoomorphe de Gua Unak, probablement un décor de couvercle d’urne funéraire, reconstituée par ordinateur.

L'archéologie
de Bornéo

Après de longues années de prospection de surface qui laissaient entrevoir un riche passé préhistorique, un programme de coopération franco-indonésien a pu être mis en place en 2003 avec le Centre national de la recherche archéologique indonésien.

Les sites d’habitat sont généralement situés au pied des falaises, c’est-à-dire à l’aplomb des grottes ornées, puisque les microsondages préalables avaient montré que les cavités à peintures rupestres n’avaient pas servi de lieux d’habitation.

Les premiers sondages ont fait apparaître des occupations d’assez longue durée, scandées par de fréquentes interruptions, sans que la continuité technico-culturelle des implantations en soit sensiblement modifiée.

Parallèlement à ces données matérielles, les datations (antérieures à 8 000 BP, et au-delà de 12 000 au moins) que nous avons obtenues ont bien confirmé une occupation au moins antérieure à la fin du Pléistocène, qui se prolongeait, au-delà de l’apparition de la céramique (vers 3 500 BP), jusqu’aux périodes et cultures de type austronésien proto-contemporain tels les Dayak et les Punan.

La principale surprise de ces fouilles est d’avoir mis en évidence une sépulture d’un nouveau type à Bornéo, avec des tessons de céramiques caractéristiques, proche du lapita, que l’on n’avait trouvé jusque là qu’à l’est de la Nouvelle-Guinée.

L’extension des zones de fouilles fournira probablement des éléments de réponse à ce qui reste une véritable énigme.

 

J.-M. Chazine

A : Exemples de céramique à décor cardial (utilisant une coquille de cardium), trouvée à plusieurs reprises dans les Monts Marang alors qu’elle est tout à fait exceptionnelle dans le nord-ouest de Bornéo.

B : Col de grande jarre funéraire (parce qu’associée à des os humains et insuffisamment cuite) décoréede motifs curvilinéaires alternés provenant d’une galerie haute de Gua Keboboh

C : La plus grande des jarres funéraires trouvées jusqu’à présent à Bornéo (Ilas Kerim), décorée de motifs curvilignes alternés en strates qui pourraient correspondre aux différents stades d’initiation de son propriétaire. Ces décorations la rapprochent étrangement de la morphologie des « Lapita ».

Dans les sondages, mélangés à du cerf et du sanglier, beaucoup de fragments de carapaces de tortue éclatées sont apparus. En particulier, un plastron presque complet, avec des traces d’ocre à l’intérieur. Il pourrait s’agir d’un mortier ou d’un récipient. Cette utilisation des carapaces de tortues (ainsi que les coquilles de bivalves d’eau douce) comme palette à ocre, est citée dans la littérature ethnographique. La tortue y est rangée dans le bestiaire des esprits sinon sacrés, du moins influents, avec lesquels on se doit d’entretenir des relations respectueuses pour s’assurer qu’elles restent bénéfiques. Très fréquente dans les pétroglyphes d’Océanie et d’Insulinde orientale, elle n’apparaît que cinq fois dans l’inventaire des peintures de Bornéo.

Fouille et prélèvement d’une sépulture à Gua Keboboh, en vue d’une analyse ADN et d’une datation au 14C.

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